L’économie du Vatican
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C’était le 8 mai dernier : sous les yeux du monde entier, le Vatican annonçait « Habemus papam ». Habemus papam, alléluia ! Mais est-ce que Habemus pépètes ? Mais au fait : combien gagne le Pape ? Et qui le paye ?
Même si les voies du Seigneur sont impénétrables, essayons de voir si ses finances le sont un peu moins. Aujourd’hui dans Spoune, on décrypte l’économie du Vatican.
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M’enfin Spoune, vous qui parlez si souvent de richesse spirituelle… Pourquoi cette question si bassement matérielle ?
Eh bien parce que, contrairement à ce que la déco de la chapelle Sixtine laisserait penser, le plus petit État du monde à de gros problèmes de tréso :
- budget 2024 : 1,2 milliard d’euros
- déficit : 83 millions, soit 7 % de déficit
Et ce déficit augmente chaque année…
Et si on analysait le Vatican comme une entreprise normale ? C’est quoi son business plan ? Son budget ? Sa politique RH ? 🤔
Et comment on fait pour s’asseoir au board du Saint-Siège ?
Au commencement était… l’organigramme.
Petite revue des troupes :
- Au sommet, le pape
In excelsis CEO : au Vatican aussi, les décisions viennent d’en haut. Pas de Dieu directement (a priori), mais du pape qui dispose du pouvoir absolu sur l’exécutif, le législatif et le judiciaire). Au moins, les réus sont rapides. - N-1 : les cardinaux et la Curie
Ils dirigent le gouvernement et l’administration du Vatican (aka la Curie). Et si les cardinaux dirigent les différents ministères spécialisés - l’intérieur desquels on trouve aussi des laïcs et même (tenez vous bien) des femmes. - N-2 : les nonces apostoliques
Non(ce), ce ne sont pas des anciens PDGs de TF1 reconvertis, mais les ambassadeurs du pape à l’étranger. - Bas de la pyramide
Ajoutez quelques centaines d’employés pour gérer la diplomatie, les musées, les archives ou encore la sécurité.
Au total ? Ça fait tout de même 4 500 personnes sur le payroll du Saint-Siège...
Attends Spoune, on peut être salarié du Vatican ? Le pape et ses confrères ne bossent pas gratuitement ?
Figurez-vous que pape, c’est une plutôt bonne situation, avec un salaire mensuel assez divin de 30 000€ (un salaire que, fidèle à son vœu de pauvreté, le pape François refusait de toucher).
Pour les autres ? Les salaires sont un peu moins célestes :
- Cardinal : 4 500€/mois
Perks : gîte, couvert et costume rouge (symbolisant le sang du Christ). Bonus : ces 4 500€ sont nets d'impôts puisque le Vatican n’en prélève pas. Le paradis (fiscal) sur Terre. - Garde suisse : 1 300 €/mois
Perks : pantalons bouffants, lances médiévales et travail au grand air de la place Saint-Pierre. Attention, c’est un “métier passion” puisqu’un garde suisse gagne moins qu’un smic.
Pantalons bouffants, costumes rouges vifs… ça doit faire un sacré budget pressing. Qui finance tout ça ?
Comme on le disait, les voies du seigneur sont impénétrables, et son budget aussi : le budget du Vatican n’est pas public. Mais en 2022, The American Jesuit Review estimait le budget du Saint-Siège ainsi :
- 💸 Le denier de Saint-Pierre (6 %) : une quête XXL collectée par les nonces du monde entier. En 2023, ça faisait 103 millions d’euros, dont 28% viennent des US.
- 📸 Le tourisme (5%), à hauteur de 100 millions par an. Il vous coûtera 20€ pour visiter le musée du Vatican et apercevoir un instant la chapelle Sixtine – avant d’être poussé vers la sortie par la masse des touristes.
- ⛪️ Les donations des diocèses (24%), venant des cardinaux du monde entier. On comprend mieux l’aigreur des participants au conclave en découvrant la qualité du catering…
- 🏡 Les revenus auto-générés (65%), principalement liés aux placements financiers et à la gestion immobilière de ses biens. Biens au pluriel puisque le Vatican possède plus de 5.000 propriétés dans le monde entier. “Sur cette pierre, je bâtirai mon église”, qu’ils disaient…
5 000 biens ? Et ils sont en faillite ???
En faillite non, mais en sacré déficit, oui ! Pour pas mal de raisons :
- Un patrimoine colossal… très mal géré : sur l’ensemble des propriétés du Vatican à Rome, seulement 15% sont loués au prix du marché. Résultat, chaque année, le Saint Siège est obligé de vendre des apparts pour se renflouer.
- La quête, c’est plus ce que c’était : si les dons restent importants, ils sont globalement à la baisse – et malgré le paiement sans contact à la messe.
- Une incurie dans la Curie : les cardinaux ne sont pas toujours les moins dépensiers, ni les plus probes. En 2023, le cardinal Becciu (numéro 2 de la Curie entre 2011 et 2019) a été condamné par le tribunal du Vatican pour corruption et avoir fait perdre entre 130 et 180 millions d'euros au Saint Siège, en achetant notamment un immeuble ultra luxueux (et totalement surpricé) à Londres.
- Une réforme des retraites à venir ? La religion, ça conserve ! Le Vatican fait face à un vieillissement de sa population sans précédent et son système des retraites est très franchement déficitaire. Pourtant, on ne peut pas dire que ce soit l’âge de départ à la retraite qui pose problème : en vertu du Code de Droit canon, les cardinaux sont priés de présenter leur démission à l’âge de… 75 ans !
Le Vatican a beau avoir la tête dans le ciel, il a comme tout le monde les pieds sur terre, et la quête de la richesse spirituelle peut difficilement se faire dans l’oubli total des considérations matérielles… Le Saint-Siège devra donc s’inspirer des entreprises normales et mettre de l’ordre dans ses finances. Tant que l’inverse n’est pas vrai et que votre manager ne vous demande pas de l’appeler “Mon père”...