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La fraude est-elle bonne ?

La fraude est-elle bonne ? 


Attention, souvenir crispant. Qui n’a pas vécu ces horribles parties de Monopoly – ou pire, de Risk – avec un de ces potes insupp’ qui ne peut jamais s’empêcher de tricher ? 

Sur le moment, pas évident de prendre la chose avec philosophie. Pourtant, derrière le goût de la magouille et l’obsession pathologique de victoire de ce triste (ex-)pote, il y a une vraie question existentielle : la triche fait-elle partie du jeu ? Plus largement, la fraude est-elle indispensable à tout système ? 

Aujourd’hui, Spoune la joue comme Chirac et saute allégrement au-dessus du tourniquet de la morale pour se demander si, oui ou non, la fraude c’est cool. 

Police ! Au voleur ! Spoune a craqué et nous incite tous à frauder !!

Grands dieux non, si vous saviez comme on est bons élèves chez Spoune… Non, ce n’est pas nous qui vous incitons à tricher. C’est plutôt que, même si on ne s’en aperçoit pas, la plupart des business sont OK avec la fraude.Prenons un exemple tout simple : la caisse automatique du supermarché. Vous ne vous êtes jamais demandé pourquoi c’est si peu surveillé ? Et pourquoi c’est si facile d’oublier ses Petits Filous au fond du tote bag ? (Oupsi…)

Oui, on vous voit – et le gérant du supermarché aussi. C’est ce qu’on a appelé le fameux paradoxe de la caisse automatique : les supermarchés savent très bien que les caisses automatiques augmentent la fraude. Mais ils l’acceptent car le coût de cette fraude reste inférieur au salaire d’une caissière…Ce qui conduit certains à affirmer que, toute considération morale mise à part, du point de vue économique :

“Dans un système donné, le niveau de fraude optimal est supérieur à zéro.”

What the Fraude, Spoune ? Un peu de fraude serait mieux que pas de fraude ?

On n’aurait pas mieux dit. Pourquoi ? Parce que la quête du zéro fraude, c’est souvent l’enfer.Prenez un aéroport, par exemple. Si c’est devenu l’enfer de prendre l’avion (et tant mieux, vu que ça pollue), c’est précisément parce que les contrôles de sécurité à l’embarquement ont une tolérance à la fraude proche de zéro. Ce qui implique donc :

  • perte de temps : files d’attente à rallonge
  • contraintes fortes et gâchis : objets interdits à jeter ou à mettre en soute
  • coût financier : ressources humaines pour contrôler chaque passage sans exception

Autre exemple : la criminalité. On pourrait, comme dans Minority Report, imaginer un système zero crime. Sauf que, chercher à empêcher tous les crimes, serait a priori très coûteux en termes :

  • d’argent : bien plus évidemment que d’intervenir a posteriori sur quelques crimes seulement…
  • de liberté : coucou le monde Orwellien totalitaire qui consiste à surveiller tout le monde, tout le temps. 

Bref, le monde parfait du zéro fraude, c’est juste l’enfer. Au-delà des aspects moraux, la lutte contre la fraude est donc toujours un arbitrage coût/bénéfice, une question de curseurs à positionner sur plusieurs axes :

Ah Spoune, mais alors, “To fraude or not to fraude, that is the question…”

Bon, loin de nous l’idée de justifier toutes les fraudes. Rappelons par exemple qu’en France, la fraude fiscale représente chaque année entre 60 et 80 milliards d’euros– c’est-à-dire plus de 15 % du budget annuel 2024 (480 milliards d’euros).C’est colossal et, en l’occurrence, bien trop élevé. Car si le montant optimal de fraude est parfois supérieur à zéro, il ne doit quand même pas en être très éloigné.Par exemple, les sites de e-commerce cherchent toujours le bon équilibre entre :

  • un système suffisamment contraignant pour éviter la fraude
  • un système suffisamment fluide pour ne pas freiner la conversion (ou les ventes). 

Mais parfois, il faut accepter un certain niveau de fraude pour que le système fonctionne bien. Par exemple :

  • pour les cartes bleues : oui, c’est super facile de piquer un numéro de CB 
  • pour le paiement en plusieurs fois : oui, c’est super facile de faire opposition sur une CB pour bloquer un paiement échelonné. 

Dans les deux cas ? Un système plus contraignant serait simple à mettre en place, mais il limiterait aussi l’utilisation du service. De ce point de vue, la fraude est vue comme le coût de déploiement d’une technologie
D’ailleurs, si vous vous êtes déjà posé la question, la création de compte ou l’exigence de distinguer “shipping adress” et “billing adress” sont des procédés qui, entre autres, visent à minimiser les fraudes.

Bah super Spoune, la confiance règne…

Ce qui est super triste dans le monde ultra-sécurisé du zéro fraude, c’est qu’on part du principe que plus personne ne se fie plus à personne. Et mine de rien, c’est un peu ce vers quoi l’on se dirige. Toutes les études et sondages sont unanimes :  nos sociétés sont en pleine crise de la confiance.

  • envers les gouvernements, les assos, les médias et les entreprises ; 
  • mais pire, entre les individus aussi ! 

Quand on demande aux gens comment ils se comporteraient avec quelqu’un qui ne partage pas leurs opinions, voilà ce qu’ils répondent :

  • 30 % les aideraient s’ils en avaient besoin
  • 20 % voudraient bien vivre dans le même quartier
  • 20 % accepteraient de travailler avec 

Et pourtant, la meilleure technologie anti-fraude qui soit, c’est bien la confiance. Elle paraît souvent candide, naïve et sous-estimée, et pourtant, à long terme, c’est le meilleur mortier d’une société vertueuse. Pour vous en convaincre, on a mieux qu’un long discours : le génial Game of Trust, un serious game inspiré de la théorie des jeux qui est aussi la meilleure démonstration possible du pouvoir de la confiance.

Conclusion 


La triche fait-elle partie du jeu ? Au Monopoly, on ne sait pas. En économie, elle est parfois le prix à payer pour fluidifier un système. Ce qui est rassurant, c’est que même si l’économie est traditionnellement plutôt team Machiavel, à considérer que la fin justifie les moyens, les choses changent ! La morale, la transparence et la responsabilité prennent de plus en plus de place dans nos habitudes de consommation et dans nos modèles d’entreprise. Comme quoi, il y a de quoi reprendre confiance :)