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Pourquoi le changement est utile

Contre vents et marées, contre le climat qui se réchauffe, la reconversion du prince Harry et l’irrésistible ascension des bananes portées en bandoulière, une chose ne changera jamais. Dans les salles d’entretien, les soirées, les Zooms ou à table chez vos parents, on vous posera toujours la même question :

« Et sinon, toi, tu te vois comment dans cinq ans ? »

Ce qui ne changera pas non plus ? C’est votre réaction d'écureuil pris dans les lumières de phares de voiture. Se projeter dans cinq ans alors qu’on maîtrise à peine le site impots.gouv et sa liste de courses sur smartphone ? Au mieux, cela donne une réponse convenue empruntée à Google et qui n’aura aucun rapport avec ce que vous voulez vraiment. Au pire, ça débouchera sur une fuite intellectuelle si puissante que vous vous roulerez en boule sous votre plaid en pensant que la vie d’adulte est décidément quelque chose qui n’existait que dans les années 50.

Ok Spoune, j’avoue qu'on hyperventile devant la question... mais pourquoi on lui accorde tant d’importance ? 🤷🏼

Parce que mine de rien, elle représente un sujet fondamental et moderne. Surtout depuis qu’un virus nous a fait imaginer une autre vie en regardant le plafond depuis notre clic-clac. Le big deal ? Changer. Changer, et pour le meilleur, évidemment. Surtout qu’en cette entrée dans l’automne, les feuilles tombent toujours autant que les articles, livres, BD, films, séries TV et autres œuvres consacrés au sujet.

Le problème, c’est qu’on n’y arrive pas. Si on est très fort pour savoir que l’on veut changer, nous sommes mauvais quand il s’agit d’étaler les 5 whys de l’action : pourquoi, comment, où, quand, et avec qui. Pas de panique, c’est normal. Et doux ciel, ce normal porte un nom — ouloulou, ça fait flipper : l’illusion de la fin de l’histoire

L’autoroute des métamorphoses

Trois chercheurs de Harvard se sont attaqués à cet immense paradoxe : au départ, on veut tous changer, mais au final, on ne fait pas grand-chose pour vraiment y arriver (un peu comme les résolutions). Après avoir fait plein d’expériences de psychologie, ils se sont rendu compte d’une chose qu’on appelle un biais cognitif (spoiler : on en a plein). Le plus périlleux de tous : nous avons tendance à penser que nous resterons toujours la personne que nous sommes aujourd’hui. Les chercheurs ont alors formé deux groupes de sujets : le premier devait revenir sur les dix années passées, le second devait imaginer les dix prochaines.

Conclusion académique : si les premiers confient qu’ils ont beaucoup changé en une décennie, le deuxième n’arrive pas à admettre qu’ils changeront, ne serait-ce qu’un poil.

Conclusion simple, basique : plus on vieillit, moins on pense qu’on va changer. Fin de l’histoire.

Voilà, on a même fait un dessin.

Alright les gars, mais pourtant on est doué pour s’inventer des vies, alors reconnaissons qu’on peut bien se projeter un peu.

C’est sain de refaire le monde autour d’un verre. Mais l’illusion de la fin de l’histoire a ceci de malsain qu’elle empêche souvent l’action et qu’elle nous laisse patauger dans nos vies de locataires adolescents avec la même liste de courses que celle de votre première année de fac. Aussi, pour les cerveaux d’Harvard, cette illusion produit trois vrais obstacles à esquiver :

1) Le péage du présent : il est plus facile de pérorer sur le présent plutôt que d’imaginer le futur. En faisant ça, vous cessez d’imaginer qui vous voulez être et il y a de grandes chances que vous ne deveniez rien d’autre que ce que la vie décidera de faire de vous.

2) Le muret des étiquettes : nous avons une fâcheuse tendance à parler de qui nous sommes, ici et maintenant, de façon définitive. « Je suis introverti », « Je ne suis pas à l’aise avec les gens », « Je n’aurai jamais d’amis ». Quand on considère quelque chose comme une vérité définitive, on ne prend même plus en compte les alternatives possibles. Un cas scientifiquement prouvé : lorsque les gens dépriment, ils ont l’impression qu’ils déprimeront toute leur vie.

3) Le dos d’âne des plans de courte durée : c’est le piège des résolutions. Si l’on se concentre que sur des petites actions sans imaginer une grande et belle sculpture de soi, on risque de reprendre très vite ce pot de glace aux noix de macadamia, en s'enfonçant toujours plus profondément dans son canapé.

Les chemins de Montaigne

Au cours d’une bataille, Montaigne tombe à cheval, puis dans le coma. Vécu comme une petit mort, il en ressortira transformé. Dans ses Essais, le philosophe bordelais du XVIème siècle transpose alors son expérience humaine en écriture. Après le drame, il changera tout. Il abandonne son mandat de magistrat, laisse sa femme gérer son domaine et ses affaires (en 1585 !) et revendique une vie sans héroïsme. En ses termes, au fatras du monde, il préfère « cultiver son jardin ». On ne vous souhaite évidemment pas à une chute à cheval mais de plonger dans la philosophie de Montaigne pour qui le changement passe par l’art de la diversion et l’importance du présent. Dans un best seller intitulé Comment vivre. Une vie de Montaigne en une question et vingt tentatives de réponse, Sarah Bakewell nous dit : « Ne pas se soucier de la mort devint sa réponse la plus fondamentale, la plus libératrice, à la question du "comment vivre". Elle permettait de faire simplement cela : vivre. »



Et bah ! Il ne fait pas rêver votre itinéraire. Dites Spoune, comment on construit l’autoroute du changement ?


L’étude de nos trois game-changers américains a été publiée en 2013. Depuis, d’autres ont essayé de donner une suite à la fin de l’histoire. Parmi eux : Benjamin Hardy, psychologue et accessoirement auteur le plus suivi de Medium pendant trois années d’affilée. Dans son livre intitulée "The gap and the gain", on peut isoler trois conseils pour rouler tranquille vers un futur qui change :

1) Distinguer le passé, le présent et le futur moi ⏳

Et ça commence par admettre une vérité : vous n’êtes pas la même personne que vous étiez hier. Vous ne faites probablement pas les choses de la même manière, tout comme vous ne voulez plus les choses que vous vouliez avant. Reconnaissez donc combien vous avez grandi et changez par rapport à votre ancien moi. En clair, il s’agit de mesurer le « gain » et pas le « gap »

→ Le tips du pilote du changement : Entraînez-vous à mesurer vos progrès sur une base hebdomadaire, mensuelle ou trimestrielle. Vous verrez alors, sur une frise par exemple, que vous vous distinguez peu à peu de votre ancien moi. Et sans forcer, vous dessinerez le futur.

2) Imaginer son futur moi 👵🏼

Vous avez les crayons, mais vous ne savez pas trop quoi écrire. Les recherches en sciences cognitives et comportementales montrent que dessiner son futur moi requiert des actions délibérées. Vous devez donc avoir un but pour étaler un processus devant vous. Exemple : si vous rêvez d’être l’écrivain du siècle, l’idée seule ne suffit pas. Il va vous falloir se dire que noircir des pages tous les jours est peut-être un bon objectif. Un objectif qui vous oriente et vous sculpte, petit à petit.

→ Le tips du pilote du changement : on n’a toujours pas fait mieux que Bridget Jones. Fabriquez un journal intime et commencez par vous interroger : quelles sont les trois choses que je peux faire aujourd’hui afin de faire des progrès vers mon futur moi.

3) Changer la narration de son identité 📖

Selon Benjamin Hardy, vous êtes ce que vous dites de vous mêmes. Et cela vaut sur les trois temps : passé, présent, futur. Dites aux gens autour de vous qui vous voudriez être, en confiant honnêtement que votre futur moi sera différent de la personne que vous êtes aujourd’hui.

→ Le tips du pilote du changement : commencez par verbaliser vos envies à l’apéro et réfléchissez d’abord à pourquoi vous voulez le faire. La répartie de vos potes feront émerger les bonnes questions et donneront corps à votre nouvelle histoire.

Et si finalement, le changement, c’était effectivement maintenant ?

L'Uppercut du jour

En finir avec Eddy Bellegueule
Dans un ouvrage paru à la rentrée et intitulé Changer : méthode, l’écrivain français Édouard Louis revient sur ses métamorphoses successives. Pour s’arracher à son milieu d’origine - extrêmement populaire - le jeune Picard changera son apparence, sa manière de manger, sa voix, son rire ou son visage. Issu d’une famille qui le destinait au travail à l’usine, Édouard Louis est devenu un des auteurs les plus influents de sa génération. Cela a un nom puisqu’on appelle ça un « transfuge de classe ». Une manière de montrer que changer, c’est réussir sa vie.