Spoune

Spoune, c'est 2 emails par mois 📩
pour devenir money-smart 💡
Abonnez vous !
Bienvenue à bord ! à très vite dans votre boîte aux lettres.
Oops! Something went wrong while submitting the form.
Recevoir Spoune

Le prix de l’ennui

Le prix de l’ennui

Cette semaine, Spoune se fixe un objectif pas du tout habituel. 

On va    tout,         

 tout                     

                   donner                               

             pour

vous

                           faire

bail–

                                -ler

P.-S. : cette accroche vous a décroché la mâchoire ? dites-le nous ici !

Bon. On ne pas vous refaire le coup des paresseux de Zootopia (peut-être la scène la plus hilarante de l’histoire du cinéma). Mais aujourd’hui dans Spoune, on va parler d’ennui. Celui dans lequel le bruit des mouches remplace l’intarissable buzz des réseaux sociaux et qui nous confronte à cette question terrifiante :  “La plupart du temps, je fais donc je suis. Mais quand je ne fais rien, qui suis-je ?” 

Après Hamlet, Hamle(n)t explore cette question abyssale : s’ennuyer ou ne pas s’ennuyer ?

Notre Spounsor du jour : Homaio

Détruisez des tonnes de CO2

Supprimer des tonnes de CO2 ? C’est possible grâce à Homaio, la plateforme qui permet d’investir dans l’action climatique – via les quotas carbone, ces fameux “droits à polluer” qui incitent les entreprises à réduire leurs émissions. Depuis ce mois-ci, Homaio propose une nouvelle fonctionnalité : détruire des quotas ! Ce qui permet de réduire définitivement le volume des émissions autorisées dans l’UE – et accessoirement de compenser votre propre bilan carbone. Pour en savoir plus, inscrivez-vous ici avec le code SPOUNE25.

S’ennuyer, Spoune ? Vraiment, je vois pas l’intérêt… 

Ce n’est pas très étonnant. Si, de nos jours, l’ennui n’a plus de valeur, c’est parce qu’il a perdu du sens. On s’explique. Comme le rappelle Jean Miguel-Pire dans l'excellent Otium, chez les Romains, la journée se divisait en deux grandes catégories : 

  • Le negotium, soit le négoce ou les affaires courantes. En gros, la vie pro. 
  • L’otium, soit le loisir. 

Ce qui est intéressant ? C’est que le negotium est en réalité (wait for it…) le “neg-otium” 🤯, soit le contraire absolu de l’otium.

Et pour les Romains, le premier est bien moins important que le second. L’otium n’est pas l’ennui soporifique mais bien le loisir fécond : celui qui nous permet d’oublier les considérations bassement matérielles pour se concentrer sur les sujets dignes de ce nom : philosophie, métaphysique, épistémologie… 

Booooring Spoune. Et surtout, c’est pas la philo qui va me payer mes Spritz en Italie…  

Clairement, vous n’avez pas le time. Et nous non plus ! C’est l’un des grands drames de notre époque : on est constamment à la recherche du temps perdu. 

Si notre temps libre s’évapore sans qu’on s’en rende compte c’est que, contrairement à l’époque de nos amis les Romains, notre temps d’otium est désormais convoité par de redoutables prédateurs : tous les géants de l’économie de l’attention, aka Netflix et autres réseaux. En 2024, le temps d’écran moyen quotidien en France était tout de même de 4h27 – et même plus de 7h pour les adolescents… 

Ça, c’est la malédiction de l’économie de l’attention, dont on avait déjà parlé ici

On a : 

  • À ma gauche, celles qui vous aident à “dépenser” votre temps libre (Netflix, Instagram, Tik Tok, podcasts…). Et qui prennent, en plus de votre argent, ce fameux temps de cerveau disponible. 
  • À ma droite, les boîtes qu’on paye pour “gagner” du temps (Uber, Amazon…)

La folie du truc ? C’est qu’on paye les seconds pour récupérer un temps qu’on dépense auprès des premiers…

OK Spoune, mais y’a pas que la philo dans la vie. Y’a la poterie, aussi. Ou la vannerie. 

Ah, les loisirs créatifs, parlons-en. Fut un temps, pendant l’enfance, ils étaient effectivement le remède imparable aux longs après-midi d’ennui. On pratiquait chez soi la peinture, la poterie, la broderie… 

Mais aujourd’hui, même les loisirs n’échappent plus à cette logique de marchandisation du temps : on est tellement dépossédés de notre temps qu’on paye encore d’autres personnes pour se le réapproprier. Pour, comme on dit, “s’offrir un moment pour soi”... 

Résultat : même notre propre temps libre s’achète. 

Ça donne certes des projets ultra-sympa, comme la géniale Papoterie ou les supers ateliers d’artisans WeCanDoo – qu’on aime vraiment beaucoup. Mais ce qu’on paye dans ces lieux, c’est aussi, d’une certaine manière, la peur de l’ennui, ou le besoin de discipline

Bref : c’est un temps libre qui ne l’est pas vraiment. 

Damn Spoune. Comment reprendre le contrôle de son temps ? 

Comme le dit Hadrien Klent dans le génial Paresse pour tous, il faut apprendre à “retrouver la propriété du temps”.

Il y a plein de raisons de revaloriser l’ennui. Et on parle bien de l’ennui, le vrai : pas celui où on s’ennuie devant la télé, mais celui, un peu vertigineux, où l’on est seul face à soi-même. 

Cet ennui fait d’ailleurs tellement peur que, dans une expérience américaine, les gens préfèrent recevoir une décharge électrique très désagréable plutôt que rester tout seul sans rien faire pendant 15 min…

Et pourtant, il y a plein de bonnes raisons de s’ennuyer ferme : 

  • pour le kiff de ne rien faire : pour tout simplement dire stop aux injonctions, et ne rien faire – ce qui est cool aussi. 
  • pour se détendre : l’ennui correspond au mode “par défaut” du cerveau. Quand on s’ennuie, notre attention se détache des éléments extérieurs pour se focaliser à la place sur l’introspection et la créativité. S’ennuyer, c’est comme faire “un reset cérébral” – ou, si vous préférez, redémarrer votre ordi : c’est indispensable de temps en temps. 
  • pour chercher de nouvelles sources de distraction : selon cette théorie, l’ennui serait à la curiosité ce que la faim est à l’appétit. Alors que l’appétit nous pousse à rechercher ce qu’on connaît déjà (ex: “Miam, j’ai trop envie d’un burger ce midi”) l’ennui nous pousse quant à lui à tester de nouvelles choses (ex : “Je sais pas du tout quoi manger ce midi… tiens, si je testais ce nouveau resto ?”

Beaucoup de grands artistes le disent : pour créer, ils doivent d’abord se couper du monde pour, en s'éloignant de toute distraction, se mettre au pied du mur de la création.

Pour le dire autrement, l’ennui est aussi un excellent moteur de la curiosité et des nouvelles découverte   

Comme dit Austin Kleon, très bon auteur sur la créativité : 


L'ennui est un filtre. Les idées basiques viennent avant lui. Les idées les plus inattendues arrivent après lui. Les meilleures idées surgissent à travers l'ennui.

Conclusion

S’ennuyer ferme ? Eh non, s’ennuyer ouvre ! Oui, l’ennui ouvre de nouvelles perspectives, de nouveaux horizons. Voilà donc une bonne raison de s’y adonner – tout du moins temporairement. Car sans retomber dans les injonctions à la performance, une vie 100 % ennui serait tout de même un peu morne. Et malgré toutes ses vertus, l’ennui reste – comme toute chose – à consommer avec modération.