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L'argent rend-il méchant ?

Ah, vous avez ouvert ce mail ? Malgré ce titre racoleur et ce cliché éculé ? Bon, en même temps, avouez. De temps en temps, les super-riches ne font rien pour faire mentir les stéréotypes, bien au contraire. Coucou les délires mégalo de Jeff Bezos qui s’apprête à faire démonter un pont historique à Rotterdam pour son gros bateau. Alors si comme nous, vous avez adoré détester la famille Roy dans l’incroyable série Succession, vous vous êtes forcément posé la question : mais pourquoi les riches sont-ils si méchants ?

Et est-ce que l’argent rend fou ?

Quand on y pense, c’est peut-être la première question à laquelle une newsletter de finances personnelles devrait répondre… Alors il était temps que Spoune s’y mette.

L'expérience du Monopoly

On l’a tous constaté le dimanche après-midi : le Monopoly ne révèle pas toujours la meilleure part de nous-mêmes... Justement, en 2013, le chercheur Paul Piff a utilisé le Monopoly pour étudier comment l’argent pouvait transformer le comportement des gens. Il proposait à deux volontaires de jouer au Monopoly, mais attribuait aléatoirement à l’un d’eux plusieurs avantages : plus d’argent au départ, et un dé supplémentaire à lancer.Forcément, le privilégié gagne… Et rapidement, son comportement change :

  • il déplace son pion en faisant plus de bruit ;
  • il mange plus de bretzels ;
  • il se moque du joueur le moins chanceux ;
  • à la fin, il explique son succès par sa meilleure stratégie.

Bruyant, gourmand, sans empathie et prétentieux. Bref, selon l’expérience de Paul Piff, l’argent rendrait horrible… 😠

OK, too bad pour le Monopoly… Mais dans la vraie vie ?

Dans la vraie vie ? Les travaux de ce fameux Paul Piff tendent à montrer que oui, l’argent rendrait mauvais. Dans ses études, les riches prennent cher…

  • Les plus riches (revenu >$150K) se servent deux fois plus souvent que les plus pauvres (<$25K) dans un pot de bonbons étiqueté “pour les enfants”.
  • Quand il faut choisir entre garder pour soi un billet de $10 trouvé par hasard ou le donner à un inconnu, les plus pauvres donnent 44 % plus souvent que les plus riches.
  • À un passage piéton prioritaire, plus une voiture est chère, moins elle est susceptible de s’arrêter (la probabilité diminue même de 3 % par tranche de $1000) 🚘

Evidemment (et c’est toute la beauté des sciences sociales), plein d’autres études arrivent à des résultats diamétralement opposés, tendant à prouver que les riches ont un cœur d’or 😍

  • À Londres, quand une enveloppe est trouvée par terre, il y a quelqu’un pour la ramasser et la poster dans 87 % des cas dans les quartiers riches — contre 37 % dans les quartiers pauvres.
  • Aux Etats-Unis, plus les gens sont riches, plus ils sont susceptibles de donner un rein.

Alors ? Dur dur d'être blindé ?

Avant de les plaindre, relativisons : les riches sont de plus en plus riches. Entre mars 2020 et octobre 2021, la fortune des milliardaires français a augmenté de 86%. Et dans le monde, c’est pareil. Ce qu’ils font de tout leur argent ? Il y a plusieurs options :

  • Ceux qui claquent tout : dans des maisons démesurées ou dans des délires mégalos type course à l’espace (Musk, Bezos) ou à l’immortalité (Sergei Bryn) 💸
  • Ceux qui en donnent une partie : comme les 69 milliardaires membres de The Giving Pledge, de Bill Gates et Warren Buffet, qui ont promis de donner au moins la moitié de leur fortune à des œuvres de charité… au sens trèèès large : ça va de “combattre la malaria en Afrique” à “construire un bâtiment à votre nom dans son ancienne université”...

Eh oui, quand les riches donnent, certains ne peuvent s’empêcher de voir l’anguille de l’optimisation fiscale sous le petit rocher de la générosité… Bon, d’un côté, leurs dons sont évidemment indispensables au fonctionnement de bon nombre d’organismes. Mais de l’autre, il est vrai que certains super-riches abusent un peu de l’optimisation fiscale — là-dessus, voyez l’excellent Billionnaire Tax Calculator. Mais récemment, il y a aussi de plus en plus de riches qui se méfient de la richesse :

  • Pour les autres (enfin surtout… pour leurs enfants) : il y a par exemple Pierre-Edouard Stérin, fondateur de Smartbox, qui a déshérité ses enfants pour “éviter de les pourrir”, et donnera ses 800 millions d’euros à des associations. Ou encore Charles Kloboukoff, qui a transmis son entreprise Léa Nature à un fonds philanthropique.
  • Pour eux-mêmes : dans son livre Ouvrir une voie, Emmanuel Faber explique, entre autres, avoir refusé 20 millions d’euros de retraite chapeau pour financer plutôt un programme d’actionnariat salarié, avoir donné sa maison de famille à une asso de réinsertion, rouler en Clio et passer toutes ses vacances dans un chalet du Queyras.

À propos d’Emmanuel Faber, c’est aussi lui qui dit :

“Il est grand temps que les gens qui ont suffisamment d'argent se posent la question de ce qu'ils font du reste"

Ok Spoune : prenez mon argent, moi non plus je n'en veux plus...

Mais non, rangez votre chéquier… La question, c’est de savoir comment faire bon usage de son argent. On en parlait dans notre Spoune précédente : l’argent, c’est du temps. Il nous permet d’aller plus vite, plus loin… Et bien souvent, dépenser de l’argent est incompatible avec un comportement vertueux.

Dépenser, c'est polluer  

En plein réchauffement climatique (+1,09°C en un siècle selon le dernier rapport du GIEC), s’envoler à l’autre bout du monde est le plaisir coupable auquel les plus riches n’arrivent pas à renoncer ✈️

  • Les 1% les plus riches émettent 17% des émissions carbones
  • Les 10% les plus riches émettent 50% des émissions carbones

Pas la peine d’aller en vélo au travail ou d’acheter ses fusilli en vrac chez Biocoop si on part en week-end à New York. Pour rappel, 1 A/R NYC représente 1T eqCO2, soit 50 % du budget carbone par habitant… Mais il n’y a pas que l’avion, puisque globalement, consommer, c’est polluer. Sans compter — on en avait aussi parlé dans cette Spoune — que même l’argent que vous placez à la banque pollue…

Est-ce que ça peut changer ?
Un des grands enjeux des années 2020, ce sera l’intégration des normes extra-financières (c’est-à-dire les impacts sociaux et environnementaux) dans le prix des biens et services. Peut-être qu’un jour, il faudra payer plus pour consommer plus…

L'argent donne le droit de tricher

À partir d’un certain niveau de richesse, les sanctions financières ne jouent plus leur rôle dissuasif.

Exemple
: si j’accepte de payer l’amende pour stationnement sur une place handicapée (en France, 135€), ai-je le droit de m’y garer ?

À cette question, Steve Jobs répondait oui. Forcément : proportionnellement à son revenu, l’amende représentait pour lui moins que le ticket de stationnement pour un américain moyen…

Fun fact
: il faisait même ça tellement souvent qu’en 2016, 5 ans après sa mort, la ville de San Francisco s’est aperçue qu’elle lui devait un trop perçu.

Est-ce que ça peut changer ?
En Scandinavie, la plupart des infractions sont punies par des “amendes jours”, calculées sur la base d’une journée de revenu moyen. C’est ce qui explique qu’en 2015, un homme d’affaires finlandais coupable d’un excès de vitesse (il roule à 90 au lieu de 60) se soit pris un PV de 54 000 euros

L'argent fait croire que tout est acquis

La géniale série Succession reprend le fameux adage à propos de la transmission de la richesse :

"The first generation makes it, the second generation spends it, and the third generation blows it."

Cette phrase, personne ne l’incarne mieux que la famille Vanderbilt : on croyait la fortune de son fondateur Cornélius inépuisable 💰 48 ans après sa mort, toute sa famille était ruinée à cause des mauvaises décisions de ses héritiers…

Parce qu’encore pire que devenir riche, il y a… naître riche. Clay Cockrell, le psychologue des super-riches, explique le système qui a produit tant d’héritiers incompétents : des parents hyper protecteurs qui empêchent leurs enfants d’apprendre la valeur du travail, du sacrifice ou du challenge — même s’il y a évidemment des exceptions. Parce que le pire, quand on naît riche… c’est d’oublier ce que l’argent vaut vraiment.

Car, comme dirait l’oncle Ben de Spiderman

With great power comes great responsabilities.

Conclusion

En fait, le problème, ce ne sont pas les riches : c’est l’argent. Plus on dépense, plus notre impact augmente, et plus il devient important de prendre les bonnes décisions. Et, en passant, de relativiser la notion de mérite : parce que comme au Monopoly, on préfère toujours attribuer son succès au mérite… plutôt qu’à la chance. Devenir riche ne rend pas plus heureux. Mais ça peut en revanche faire de nous de très mauvais citoyens. Alors on garde en tête le conseil de l’oncle Ben… et on continue à lire Spoune 🥄

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Crédits images : Blok Magnaye, Joanna Gniady

L'évaporation de la penderie

C’était censé être la plus belle villa des Etats-Unis, voire du monde. Son promoteur l’a appelée The One Bel Air. Elle fait 10 000 m2,  21 chambres, 42 salle de bains, 6 ascenseurs, un ciné, un spa, plein de piscines, 1 boîte de nuit, 10 000 grands crus, et 50 places de parking. Elle devait être vendue $500 millions et devenir la maison la plus chère des Etats-Unis. Raté. Criblé de dettes, le projet s’est vendu aux enchères pour “seulement” $126 millions. Et encore, elle n’était qu’à $70 millions à 1 minute de la fin… Pour une visite guidée et une rencontre avec son “modeste” promoteur Nile Niami, c’est ici.